Citations
Les Oies Sauvages
Les Oies Sauvages vers le Nord,
Leurs cris dans la nuit montent,
Gare au voyage car la mort,
Nous guette par le monde.
Au bout de la nuit qui descend,
Voyage grise escadre,
L’orage gronde et l’on entend,
La rumeur des batailles.
En avant vole grise armée,
Et cingle aux mers lointaines,
Tu reviendras, mais nous qui sait,
Ou le destin nous mène.
Comme toi toujours nous allons,
Grise armée dans la guerre,
Murmure-nous si nous tombons,
La dernière prière,
Murmure-nous si nous tombons,
La dernière prière.
Les sentinelles du soir
– La justification et la grandeur du soldat sont d’accepter de payer le prix de la guerre et une éventuelle victoire du prix fort , celui de la peur et de la mort.
– Les chants de la Légion évoquent toujours ces femmes qu’il faut quitter pour aller au combat. La voix lente et profonde, à pleins poumons , dit la déchirure et l’oubli. Elle vient du coeur.
– Compétence, exemplarité, respect, courage.
– Commander c’est être seul. La plupart des décisions qui remonteront à vous seront délicates, sinon elles auraient déjà été réglées par un autre.
– Le monde des armes est fait d’obligations gratuites : responsabilité courage , dévouement , générosité , autant de conduites qui n’ont pas de sanctions ni de reconnaissances dans la vie courante où sont prisées d’abord la réussite , l’invention , l’habileté et la richesse…
On nous avait dit…
On nous avait dit, lorsque nous avons quitté le sol natal, que nous allions défendre les droits sacrés que nous confèrent là-bas tant d’années de présence, tant de bienfaits apportés à des populations qui ont besoin de notre civilisation et de notre aide.
Nous avons pu vérifier que tout cela était vrai, et parce que c’était vrai, nous n’avons pas hésité à verser l’impôt du sang, à sacrifier notre jeunesse, nos espoirs. Nous ne regrettons rien.
Mais alors qu’ici cet état d’esprit nous anime, on me dit que dans la ville se succèdent cabales et complots, que fleurit la trahison, et que beaucoup, hésitants, troublés, prêtent des oreilles complaisantes aux pires tentations de l’abandon, et vilipendent notre action.
Je ne puis croire que tout cela soit vrai, et pourtant des guerres récentes ont montré à quel point pouvait être pernicieux un tel état d’âme, et où il pouvait mener.
Je t’en prie, rassure-moi au plus vite, et dis-moi que nos concitoyens nous comprennent, nous soutiennent, nous protègent, comme nous protégeons nous-mêmes la grandeur de l’Empire.
S’il devait en être autrement, si nous devions laisser en vain nos os blanchis sur les pistes du désert… alors que l’on prenne garde à la colère des légions !
La parole qui , trop souvent , n’est qu’un mot pour l’homme de haute politique , devient un fait terrible pour l’homme d’armes , et ce que l’un dit légèrement , ou avec perfidie , l’autre l’écrit sur la poussière , avec son sang.
Alors ils errent par le vaste monde devenu trop étroit pour y loger leur surcroît de forces inemployées, se vénérant entre eux, dédaignés à présent par les autres, héros de l’ombre un moment éblouis par les éclats de trop de soleil, la nostalgie en bandoulière, le corps plus souple d’avoir échappé à tant d’embuscades, l’esprit plus raide aussi de s’être figé si longtemps dans tous les garde-à-vous de l’Honneur.
A la recherche des Oies Sauvages
Depuis la fin des années 60, les Oies Sauvages ne volent plus en grandes compagnies.
On avait cru l’espèce disparue.
Mais au cours des années 70, on a pu observer que quelques individus s’étaient regroupés.
On les a signalés en différents endroits de la terre d’Afrique, et puis, en 1978, un petit groupe s’est posé aux Comores.
La petite compagnie s’est parfaitement intégrée dans son nouvel environnement, et plus elle prospérait, plus les autres espèces prospéraient avec elle.
Cela ne pouvait qu’attirer la convoitise de braconniers en tous genres, mais notre compagnie d’Oies Sauvages était devenue forte, et telles les oies du capitole, elle veillait, le jour, la nuit, et les autres espèces vivaient en paix.
Mais les braconniers, obstinés, à force d’attaques sournoises, parvinrent à leurs fins, et un matin de décembre 1989, sous une pluie tropicale, la grise escadre s’est envolée.
On croyait cette fois la grise armée des Oies Sauvages définitivement disparue.
Mais de nouveau, voila qu’on signalait un petit groupe d’individus venus se poser quelques temps aux Comores encore, où tous auraient été heureux qu’il s’installe à nouveau, et ailleurs, en terre d’Afrique le plus souvent, là où un des derniers espaces de liberté s’offre encore aux oies sauvages.
Des spécialistes disent que pour survivre, les Oies Sauvages se sont adaptées. Elles ne vivent plus en grandes compagnies mais par petits groupes de quelques individus, se fondant dans des volées d’espèces plus communes, plus domestiques.
Elles vivent là, faisant profil bas, mais quand l’orage gronde, elles tendent le cou vers le ciel, vers le nord, guettant à l’horizon, le vol d’une compagnie reformée, qui les emmènera, au bout du voyage…
Murmure-nous si nous tombons …
Le guerrier ne fait que porter l’épée pour le compte des autres. Son métier est un métier de seigneur, parce que le guerrier accepte encore de mourir pour des fautes qui ne sont pas les siennes.
Les Mercenaires
La guerre, sous sa forme classique, est à la porté de n’importe quel individu qu’il soit lâche ou courageux, stupide ou intelligent. Il a suffit qu’on lui donne un uniforme, un casque, un fusil, parfois des gallons, et qu’on lui dise d’aller prendre une ville, une montagne, une vallée, en le mettant dans une situation telle qu’il ne puisse agir autrement. Mais lorsqu’un homme se mêle de confondre la guerre avec l’un de ses rêves, alors il engage plus que sa vie. Le mercenaire, tel qu’il nous intéresse, se bat pour un rêve qu’il a fait enfant et qu’il ne cesse plus de poursuivre.
Puisque je suis l’un d’eux, je ne renierai jamais les miens quoi qu’ils fassent. Je ne parlerai jamais contre eux devant autrui. S’il est possible de prendre leur défense, je les défendrai. S’ils sont couverts de honte, j’enfermerai ma honte dans mon cœur et je me tairai. Quoi que je pense alors d’eux, je ne servirai jamais de témoin à charge.
Il n’y a pas d’homme plus complet que celui qui a beaucoup voyagé, qui a changé 20 fois la forme de sa pensée et de sa vie.
Le soldat n’est pas homme de violence. Il porte les armes et risque sa vie, pour des fautes qui ne sont pas les siennes. Son mérite est d’aller au bout de sa parole, tout en sachant qu’il est voué à l’oubli…
Savoir ce qui est bien et ne pas le faire c’est manquer de courage.
Tu seras un Homme, mon fils.
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou, perdre d’un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;
Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre
Et, te sentant haï sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;
Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leur bouche folle,
Sans mentir toi-même d’un seul mot ;
Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu’aucun d’eux ne soit tout pour toi ;
Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n’être qu’un penseur ;
Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;
Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,
Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,
Tu seras un Homme, mon fils.
Vous, Français, vous vous battez pour de l’argent. Et nous, Anglais, nous nous battons pour l’honneur. – Chacun se bat pour ce qui lui manque !
« QUE DIRE A UN JEUNE DE 20 ANS »
Quand on a connu tout et le contraire de tout, quand on a beaucoup vécu et qu’on est au soir de sa vie, on est tenté de ne rien lui dire, sachant qu’à chaque génération suffit sa peine, sachant aussi que la recherche, le doute, les remises en cause font partie de la noblesse de l’existence.
Pourtant, je ne veux pas me dérober, et à ce jeune interlocuteur, je répondrai ceci,
en me souvenant de ce qu’écrivait un auteur contemporain : «Il ne faut pas s’installer dans sa vérité et vouloir l’asséner comme une certitude, mais savoir l’offrir en tremblant comme un mystère».
A mon jeune interlocuteur, je dirai donc que nous vivons une période difficile où les bases de ce qu’on appelait la Morale et qu’on appelle aujourd’hui l’Ethique, sont remises constamment en cause, en particulier dans les domaines du don de la vie, de la manipulation de la vie, de l’interruption de la vie.
Dans ces domaines, de terribles questions nous attendent dans les décennies à venir.
Oui, nous vivons une période difficile où l’individualisme systématique, le profit à n’importe quel prix, le matérialisme, l’emportent sur les forces de l’esprit.
Oui, nous vivons une période difficile où il est toujours question de droit et jamais de devoir et où la responsabilité qui est l’once de tout destin, tend à être occultée.
Mais je dirai à mon jeune interlocuteur que malgré tout cela, il faut croire à la grandeur de l’aventure humaine.
Il faut savoir, jusqu’au dernier jour, jusqu’à la dernière heure, rouler son propre rocher. La vie est un combat, le métier d’homme est un rude métier.
Ceux qui vivent sont ceux qui se battent. Il faut savoir que rien n’est sûr, que rien n’est facile, que rien n’est donné, que rien n’est gratuit. Tout se conquiert, tout se mérite. Si rien n’est sacrifié, rien n’est obtenu.
Je dirai à mon jeune interlocuteur que pour ma très modeste part, je crois que la vie est un don de Dieu et qu’il faut savoir découvrir au-delà de ce qui apparaît comme l’absurdité du monde, une signification à notre existence.
Je lui dirai qu’il faut savoir trouver à travers les difficultés et les épreuves, cette générosité, cette noblesse, cette miraculeuse et mystérieuse beauté éparse à travers le monde, qu’il faut savoir découvrir ces étoiles, qui nous guident où nous sommes plongés au plus profond de la nuit et le tremblement sacré des choses invisibles.
Je lui dirai que tout homme est une exception, qu’il a sa propre dignité et qu’il faut savoir respecter cette dignité.
Je lui dirai qu’envers et contre tous il faut croire à son pays et en son avenir.
Enfin, je lui dirai que de toutes les vertus, la plus importante, parce qu’elle est la motrice de toutes les autres et qu’elle est nécessaire à l’exercice des autres, de toutes les vertus, la plus importante me paraît être le courage, les courages, et surtout celui dont on ne parle pas et qui consiste à être fidèle à ses rêves de jeunesse.
Et pratiquer ce courage, ces courages,vc’est peut-être cela
«L’Honneur de Vivre»